Nos aventures au Cross Dreams Festival de Lausanne avec Yoko Shimomura

Le 3 novembre dernier, Nintendo-Difference était invité à Lausanne (Suisse) pour assister au Cross Dreams Festival, présenté comme « le rendez-vous musical et événementiel de la pop-culture ». Au programme, concerts, expositions, conférences et arts martiaux. Rien que ça ! Retour sur une belle journée en région vaudoise.

Organisé au Théâtre de Beaulieu, le Cross Dreams Festival ouvrait ses portes peu après midi, pour terminer (très) tard dans la soirée. Arrivés presque à l’ouverture, l’affluence était alors encore timide, mais allait, avec l’enchaînement des concerts, se renforcer de manière conséquente. En effet, les trois concerts du jour, avec pour thèmes respectifs le jeu vidéo, l’animation et les séries TV, représentaient les axes majeurs du festival. Interprétés par l’Ensemble Symphonique Neuchâtel, le Sinfonietta de Lausanne et l’Orchestre de Chambre de Genève, soit les plus grands orchestres de Suisse romande, le public s’attendait donc à des performances de haute volée. Et il n’a pas été déçu. 

Avouons-le maintenant, la partie du programme qui nous intéressait le plus (et celle pour laquelle nous étions invités) était le concert-jeu vidéo « Melodiosa », centré sur les compositions de Yoko Shimomura. Les joueurs Nintendo la connaissent et l’admirent depuis bien longtemps, notamment grâce à ses mélodies inoubliables dans Street Fighter II (SNES), Super Mario RPG (SNES), ou plus récemment Xenoblade Chronicles (Wii/New 3DS) ; les autres joueurs la vénèrent pour bien d’autres titres, tels que Kingdom Hearts (PS2), Parasite Eve (PS One), Legend of Mana (PS One), ou encore Final Fantasy XV (PS4/Xbox One/PC). Bref, une légende de la composition musicale vidéoludique.

Comme pour se faire désirer davantage encore, Yoko Shimomura n’avait manifestement pas pris la pleine mesure de l’horlogerie suisse, et est arrivée avec un bon quart d’heure de retard sur scène, obligeant le présentateur à redoubler d’efforts pour trouver de quoi occuper la salle (avec brio). Au grand soulagement de cette dernière, la compositrice arriva enfin, sous les applaudissements nourris du public, avec une prestance assumée et remarquable. S’en est suivie une courte série de questions/réponses, qui aurait pu être développée un peu plus : Madame Shimomura a fait savoir que c’était la première fois qu’elle venait en Suisse, qu’elle trouvait très jolie malgré le temps nuageux ; que le processus de composition musicale variait énormément d’un projet à l’autre, étant soit planifié complètement à l’avance, soit se réalisant au fur et à mesure de la production ; que le travail sur la musique de jeu vidéo n’a pas tant changé que cela depuis les années 90, dans la mesure où la composition est faite de la même manière qu’auparavant, et que seules la technique et la technologie ont évolué, permettant de faire des enregistrements de natures beaucoup plus variées (notamment avec des orchestres), ce qui n’était pas possible il y a près de trente ans. Sur ces quelques mots de sagesse, la compositrice s’en est allée prendre place dans la salle, suivie de son interprète, puis l’Ensemble Symphonique Neuchâtel (ESN) est entré en scène.

Dirigé par Alexander Mayer, accompagné au piano par Benyamin Nuss (qui n’est pas un inconnu dans les interprétations au piano de musiques de jeux vidéo, puisqu’il a déjà fait montre de ses talents sur des compositions de Nobuo Uematsu ou Masashi Hamauzu) et au chant par Emily Pello, l’ESN était formé de deux violons, un alto, un violoncelle, trois flûtes (une joueuse) et deux hautbois (une seule joueuse aussi). L’Ensemble ne disposait pas d’instrument à percussion, ce qui promettait des arrangements aériens. 

Le concert a débuté fort, directement avec le Main Theme de Xenoblade Chronicles, puis un medley du même jeu. Sans passer en revue tous les morceaux interprétés, signalons quand même que les jeux les plus connus (cités plus haut) ont tous eu droit à une ou deux prestations formidables chacun, ainsi que des jeux un peu moins évidents ou attendus, comme The Last Ranker (PSP), Front Mission (SNES), Terra Battle (smartphone), Live A Live (SNES) et Radiant Historia (DS/3DS), et même Dan Doh!!, l’un des rares essais de Yoko Shimomura dans la musique d’anime. Un choix de musiques brillant, interprétées de manière tout aussi magnifique.

L’absence de vrai instrument à percussion a parfois obligé le piano ou les violons à en prendre le rôle, pour un résultat surprenant et, somme toute, très rafraîchissant. De même, l’incorporation de la voix (chanteuse) en tant qu’instrument de l’orchestre était une décision forte. Le pianiste, le premier violoniste, la flûtiste, l’hautboïste et la chanteuse (fabuleuse soprano !) ont par ailleurs, chacun à leur tour, eu l’occasion de se mettre en avant dans des solos impressionnants, passionnés, élégants ou épiques, soutenus par les autres musiciens au talent tout aussi immense. Les arrangements effectués ont permis de redécouvrir de nombreuses mélopées sous un autre jour, ce qui a visiblement ravi Yoko Shimomura elle-même.

Un choix minimaliste avait été fait de ne pas diffuser d’images de jeux, afin de focaliser l’attention sur l’orchestre de moins de dix personnes. C’est compréhensible, mais les images auraient pu au mieux aider à renforcer les émotions transmises par la musique, ou au moins à contextualiser certains medleys, dont les transitions étaient parfois un peu brutales. Le luxe suisse nous a contraint à faire la fine bouche et à formuler cette remarque, mais c’est sans doute la seule que l’on puisse faire à ce concert autrement fantastique en tous points.

Après une standing ovation méritée pour les musiciens et Yoko Shimomura, qui était revenue sur scène afin de baigner dans les acclamations du public qui lui étaient dues, nous avons été forcés de constater qu’une partie de la salle était restée tristement vide. La réputation des musiques de jeux vidéo n’aurait-elle pas le même impact que celles de Dragon Ball ou de séries TV comme Game of Thrones ou The Walking Dead ? Vu le nombre de spectateurs à chacun des concerts, cela semblerait être le cas… C’est regrettable, surtout au vu de la qualité de ce spectacle, qui était digne d’être apprécié par le plus grand nombre.

Au sortir du concert, et une fois la foule qui attendait le Dragon Ball Symphonic Adventure esquivée, un petit tour au « festival off » s’imposait. Partie gratuite de l’événement, on pouvait y jouer à la plupart des jeux dans lesquels se trouvent les musiques de Melodiosa sur les consoles d’origine, acheter des goodies de geeks, rencontrer des artistes et illustrateurs, assister à des combats d’armes en tout genre, écouter une conférence sur Dragon Ball, entre autres festivités (dont prendre une photo avec une statue de Tapion, le clou de la journée, à n’en pas douter). Un nombre restreint de stands et d’activités, qui évite ainsi les doublons et surtout l’impression de se marcher dessus comme c’est souvent le cas dans ce genre de conventions.

C’est très prometteur pour la suite, puisqu’il ne s’agissait que de la première édition, qui était déjà extrêmement réussie. Bravo donc, et merci aux organisateurs de Cross Dreams Festival, et à Yann Rieder en particulier pour cette belle invitation. Autres remerciements à Kelsey Hopper, pour la caution musicale de cet article.

Un reportage réalisé par Greg-sHAOlink

  • Nintendo-Difference

    par Draco

    le 6 novembre 2018 à 13:50

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