Test Nintendo Switch de Dread Nautical : le Titanic chez Lovecraft

Largement spécialisé dans les exploitations de licences mainstream sous forme de pinball en tout genre, l’équipe de Zen Studio veut aussi montrer qu’elle possède d’autres cordes à son arc et, après le très qualitatif RPG Operencia : the Stolen Sun sorti sur Switch dernièrement, c’est le genre tactical/roguelike au tour par tour qui est ici titillé avec le très lovecraftien Dread Nautical. D’un aspect très simpliste dans son rendu visuel, mais aussi dans ses mécaniques, ce titre nous propose une croisière au séjour perturbé de songes cauchemardesque renvoyant à l’Appel de Cthulhu, une ambiance contrebalancée par des personnages hauts en couleur. On embarque.


Un test rédigé par Chozo.


La croisière Foll’amour

À bord du gigantesque paquebot Hope, les voyageurs profitent paisiblement de leurs vacances au beau milieu de l’Océan Atlantique, entre salles de dancing, casinos, piscines, bars, restaurants et autres commerces. La bonne humeur générale bat son plein jusqu’à ce qu’une suite d’éclairs totalement inattendus frappent le vaisseau, faisant sombrer les voyageurs dans une sorte d’univers parallèle, défait de toute notion d’espace et de temps. Pire, la très grande majorité des passagers plonge dans un état psychologique effrayant, engendrant même certaines transformations corporelles. Le tout s’accompagne de l’apparition d’étranges et inquiétantes créatures difformes, ayant pour objectif d’anéantir les derniers survivants.

Certains vacanciers et membres de l’équipage ont en effet été épargnés par cette corruption, dont le personnage qui est contrôlé par le joueur et qu’il faut sélectionner parmi quatre archétypes aux dégaines pour le moins incongrues, entre la star de la chanson disco à la coupe afro et aux tenues sorties des dancefloors des eighties, le détective privé chelou entre Columbo et Dick Tracy, le jeunot ultra geek tête à claque et l’ex-Yakusa mystérieux qui a récemment raccroché. Chaque personnage possède évidemment des attributs uniques (points de santé, de déplacements, de défense, de visée lointaine, de techniques spéciales, etc.), alliés au maniement d’armes privilégiées, entre l’attaque à distance à l’arme à feu pour le détective et le corps à corps parsemé d’infiltration via les armes blanches pour le Yakuza.

Charge au protagoniste choisi de parcourir les vingt étages du paquebot, non seulement pour élucider le mystère qui entoure le navire, mais également pour retrouver et recruter les potentiels autres survivants. Ces acolytes potentiels ne lui feront cependant pas directement confiance, il faudra parfois discuter à plusieurs reprises avec eux via des dialogues aux choix multiples, dont les réponses influeront leurs velléités à accompagner le héros, tout en facilitant leur accueil dans la cabine refuge du bateau, formant le hub du jeu. Cette pièce va devoir être améliorée au fur et à mesure de l’avancée dans l’aventure pour attirer les personnages rencontrés, en ajoutant des lits pour les nouveaux arrivants et en améliorant les ateliers de fabrication de remèdes, de réparation et d’évolution des armes, ou encore d’apprentissage de nouvelles techniques spéciales. Enfin, c’est aussi dans cette cabine que le joueur, pour chaque nouvelle exploration, choisira les deux personnages rejoignant le héros dans son périple.


Hello de Cthulhu

Dans une approche très classique mais efficace, le gameplay de Dread Nautical propose donc un système de déplacements tactiques au tour par tour sur des niveaux en damiers, où il s’agira de venir à bout des créatures apparaissant dans les salles visitées de chaque étage du bateau, réaménagé de manière procédurale en début de partie. Il sera également nécessaire d’apporter un soutien aux nouveaux personnages croisés, souvent entourés de multiples ennemis qu’il faudra terrasser pour entamer la conversation. Les créatures battues relâcheront des éléments de ressource à utiliser dans les ateliers du hub, mais aussi de la nourriture, des objets de soin, d’amélioration temporaire d’attributs, ou encore de nouvelles armes.

Pour terminer une session, en plus de se débarrasser des monstres, d’accomplir des mini-quêtes et de récupérer des clés donnant accès à des salles inédites renfermant souvent des boss, l’équipe va devoir avancer jusqu’au poste de contrôle pour actionner la corne du bateau, qui replongera le groupe systématiquement dans un sommeil profond, les ramenant étrangement dans le hub. Lors de ce retour en situation de sécurité, la mission première va être de nourrir ses équipiers, faute de quoi ils finiront morts affamés. Il est en outre important de maintenir l’état psychologique des plus sensibles au cauchemar vécu dans l’aventure. Il devient alors indispensable de les laisser se reposer en toute quiétude et repartir avec une équipe forcément remaniée. Cette mécanique permet de renouveler de manière assez maligne le gameplay du jeu, chaque personnage présentant forces et faiblesses particulières, amenant le joueur à sans cesse renouveler sa stratégie en combat.

De prime abord très accessibles, les combats cachent une riche dimension stratégique qui se dévoile peu à peu en alternant entre les personnages et les différentes armes obtenues. Il va rapidement devenir nécessaire de retourner totalement chaque étage pour y déceler les moindres ressources tant celles-ci s’avèrent précieuses. Lors de chaque exploration, les armes disposent d’un certain nombre de points d’utilisation qui diminueront bien vite, jusqu’à rendre l’outil totalement inutilisable. Possédant plusieurs slots d’armes et d’objets de soin dont le nombre augmente en faisant évoluer chaque personnage, le joueur doit non seulement choisir judicieusement quelles armes emporter pour bénéficier d’un panel d’utilisations diversifiées, mais aussi d’intelligemment économiser certaines d’entre elles pour les salles les plus retorses. Les points de ressources, s’ils permettent de réparer toutes sortes d’objets, n’évitent parfois pas la cassure de certains d’entre eux, qu’il ne restera plus qu’à jeter à la poubelle.


Put on your dancing shoes

Que ce soit dans l’ambiance générale, le gameplay, la grande difficulté de certains niveaux, les choix de direction artistique, tout est fait pour apporter ce sentiment de tension permanente, même lorsqu’il ne se passe rien. Presque absente tant elle est discrète et se renouvelle peu, la musique est peut-être le gros point faible du jeu, avec un seul véritable thème qui tourne en boucle dans chaque niveau. Elle ressemble cependant plus à un son ambiant qu’à une véritable composition musicale, ramenant à cette ambiance pesante. Techniquement propre (allez, quelques rares petites baisses de framerate en mode téléviseur et une console qui chauffe beaucoup en mode portable, mais c’est pour chipoter) et graphiquement simpliste, mais avec une colorimétrie et un game design renvoyant aux bateaux de croisière à l’ancienne, Dread Nautical parvient à se démarquer par son côté parfois über exigeant, n’autorisant aucun faux pas au joueur.

Avec des points de déplacement différents et très limités en fonction des personnages, ainsi que des possibilités d’utilisation de coups spéciaux faméliques (une utilisation par niveau, des capacités essentiellement basées sur l’esquive et la discrétion, et ne durant souvent que trois tours), le jeu demandera avant tout énormément de réflexion pour parvenir à attaquer les ennemis de la manière la plus efficace qu’il soit. L’attaque frontale est ainsi à éviter, il va falloir chercher à se faufiler derrière les créatures pour les surprendre. Le moindre bruit de coup de feu ou d’armes non conventionnelles, comme des tuyaux de système de chauffage résonnants, éveillera les monstres et les attirera vers le groupe. D’autant plus que ces attaques sournoises bénéficient de bonus de dégâts, si précieux lorsqu’il s’agit de gérer à la fois les déplacements rapides et attaques à distance des ennemis, l’endurance de l’équipe et la survie des nouveaux personnages rencontrés.

Heureusement, pour désamorcer par moments la tension, le joueur découvrira rapidement la qualité d’écriture de l’ensemble du titre, notamment au travers des personnages recrutés. Pas de panique, l’ensemble est sous-titré en français, tout comme tous les menus traduits, avec par-ci par-là quelques coquilles de traduction ou d’orthographe. Joliment stéréotypés, avec le cuistot français à l’accent à couper au couteau, l’Italien précieux aux répliques hilarantes, la mécanicienne badass qui se bat avec des clés à molette, l’ancienne combattante afghane qui use de ses talents de sniper, ou encore le vieillard Britannique qui recherche sa femme qu’il aime tant, ces anti-héros proposent tous quelques tranches de textes leur offrant une véritable personnalité et un background plutôt intéressant. L’histoire principale est également agréable à suivre tout au long des quinze heures de jeu, notamment parce qu’elle en dit plus sur le fameux mythe de Cthulhu, au travers de pages de livre à dénicher au milieu des niveaux, permettant de traduire des passages du Necronomicon.

 

Conclusion : OUI !

Bien plus riche et prenant qu’il n’y paraît, Dread Nautical ne sera pas le tactical RPG de l’année, mais se contente de proposer une expérience tout à fait satisfaisante. Doté d’une écriture de qualité, d’une ambiance mystique réussie et d’un gameplay accessible, le titre de Zen Studios cumule les bons points malgré une musique en retrait et une difficulté qui risque de faire rager pas mal de joueurs. Quand Cthulhu fâché, lui toujours faire ainsi.

LES PLUS : 

+ Une ambiance pesante tenue tout le long de l’aventure
+ Une écriture et des personnages de très bonne facture
+ Un gameplay facile à prendre en main
+ Une direction artistique simple mais efficace
+ Une durée de vie honnête

 

LES MOINS :

– Un challenge parfois très frustrant
– Quelques coquilles de traduction
– La musique, oubliable
– Met le ventilateur de la console à rude épreuve

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Le système de verdict de Nintendo-Difference repose sur trois niveaux :

– “OUI !”

Nous recommandons l’achat de ce titre. Peu importe quel joueur vous êtes : vous l’apprécierez, à condition de ne pas être hermétique au genre.

– “PEUT-ÊTRE…”

Nous recommandons de bien lire le test avant d’acheter le jeu, car il peut ne pas correspondre à tout le monde, et ce pour des raisons qui peuvent largement être différentes d’un jeu à un autre. Par exemple, un titre peut être tout à fait exceptionnel et obtenir un “PEUT-ÊTRE…” parce qu’il se classe dans un genre de niche qui ne correspondra pas à tout le monde alors qu’un autre pourra s’avérer vraiment moyen et à ne réserver qu’aux puristes du genre ou aux fans inconditionnels (comme dans le cas d’une adaptation par exemple).

– “NON !!!”

Nous ne recommandons pas l’achat de ce jeu. Trop mauvais ou trop cher pour ce qui est proposé.

Nous avons abandonné l’idée des notes, car celles-ci n’aident en rien à faire un choix. Avec ce système vous savez si vous pouvez acheter les yeux fermés, s’il faut bien lire le test pour savoir si le jeu peut vous convenir, ou s’il faut tout simplement s’enfuir.

  • Nintendo-Difference

    par Draco

    le 30 mai 2020 à 10:37

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  • Sorties :
  • 29 Avril 2020
  • 29 Avril 2020
  • Non prévue
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  • 29 Avril 2020
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