Test Nintendo Switch de Hero must die. again, qui a dit que les héros ne meurent jamais ?

Assez peu connu en Occident, Shoji Masuda demeure en revanche très apprécié au Japon grâce à son travail sur un certain nombre de RPG populaires des ludothèques NES, PC Engine ou PlayStation. Scénariste et designer talentueux, il a notamment œuvré sur les premiers épisodes des séries Metal Max, Momotaro Densetsu et Tengai Makyo, ainsi que sur l’ésotérique Linda³ ou les deux Ore no Shikabane o Koete Yuke – abrégé chez nous en Oreshika. Avec Yuusha Shisu, le créateur proposait toutefois un concept plus personnel, lentement mûri entre 1995 et 2005 tandis qu’il voyait la santé de son père se détériorer à cause d’une cirrhose, malheureusement fatale. Il en est ressorti deux idées majeures de gameplay : d’abord, le fait que le personnage principal perde peu à peu ses capacités au lieu d’en gagner ; ensuite, une limite de temps avant sa mort inéluctable, impliquant de faire des choix dans les actions à réaliser. Paru initialement sur l’archipel entre 2007 et 2008, via les services mobiles des opérateurs DoCoMO, SoftBank et EZweb, le jeu a fait l’objet d’un remake 3D sur PlayStation Vita en 2016. Puis cette version a été remastérisée en HD, sous l’appellation Hero must die. again, pour une sortie mondiale sur PC, PlayStation 4 et Nintendo Switch, le 27 février dernier. L’occasion rêvée de découvrir une expérience plutôt singulière.


Un test rédigé par Kayle Joriin.


Le retour du Héros

Dans cet « anti-RPG », nous n’incarnons pas un énième blanc-bec lève-tard ou amnésique destiné à sauver le monde, mais un noble héros venant de rendre l’âme après avoir vaincu le seigneur démon Guille et libéré le Royaume de Robilia. Un acte de grande bravoure avant tout guidé, il faut le dire, par le désir de sauver sa bien-aimée, enlevée par le tyran. Et devant les menaces de celui-ci, il se décide même à l’affronter seul, laissant son équipe sur le pas de la salle du trône. Au bout d’un combat acharné, les deux adversaires finissent cependant par s’anéantir mutuellement et le protagoniste se retrouve alors devant l’ange Julia qui lui apprend qu’en récompense de son courage, Dieu lui a accordé un répit de cinq jours, lui laissant la possibilité de voyager sur les terres qu’il a sauvées et surtout de retrouver sa dulcinée, dont il a étrangement oublié l’identité. D’ailleurs, vu que Dieu est sympa, ce délai sera renouvelable autant de fois que nécessaire afin de débloquer plus d’une cinquantaine de fins suivant les actions réalisées.

Car malgré la défaite du grand méchant, la situation est loin d’être au beau fixe dans la contrée, donnant quelques maux de tête au Roi Edward. Autrefois unies dans l’adversité, les différentes races n’ont pas perdu de temps pour se quereller à nouveau. La tension monte entre les humains du village dévasté de Tulson, souhaitant rebâtir leurs habitations, et les sylvains de la forêt voisine, refusant que leurs précieux arbres soient coupés. Quant aux nobles de la capitale de Grandham, ils n’apprécient guère les rumeurs selon lesquelles les abyssins vendraient leur minerai au marché noir au lieu de continuer à alimenter l’économie locale, se faisant exploiter au passage. Au cours de sa tournée d’adieux, notre héros pourra donc, à sa discrétion, choisir de régler ces conflits par le biais de quêtes proposées par des alliés potentiels, susceptibles de le rejoindre ensuite. Lesdites missions nécessitant souvent d’aller explorer des donjons situés à proximité, histoire d’éliminer diverses bestioles ou de ramasser des objets spécifiques.


Vivre vite, mourir jeune et faire un beau cadavre

Dans cette optique, on disposera ainsi d’un total de cent vingt heures virtuelles. Le tout sans aucun cycle jour-nuit, puisque dans sa grande bonté, Dieu a décidé que le soleil ne se coucherait plus, de manière à nous laisser libre de nous balader sans contrainte. On passera sur le fait que cela ne semble pas vraiment perturber les habitants, ces derniers restant debout pendant cinq jours d’affilée, sans broncher. S’il peut paraître un peu dommage que le titre n’intègre pas une telle mécanique, toujours utile pour offrir davantage de profondeur au gameplay – Majora’s Mask, on pense à toi –, ce choix permet néanmoins de gérer finement son temps sans avoir à se soucier d’horaires contraignants. En effet, les minutes s’égrènent ici inexorablement (et à des vitesses variables), que l’on visite une ville, fouille un donjon ou affronte des monstres. En outre, chaque voyage sur la carte coûte quelques heures et il faut prendre en compte la fatigue du héros qui accélère le déclin de ses capacités, obligeant à se reposer régulièrement.

Bien que celui-ci débute l’aventure avec des statistiques maximales et un équipement de fou, faisant de lui le principal atout offensif du groupe, il va s’affaiblir progressivement, oubliant ses techniques ultimes et ne réussissant plus à manier correctement son armement. Il évoluera alors naturellement vers un rôle de soutien, grâce à des sorts de soin et de support, jusqu’à les perdre également, devenant juste un poids mort à protéger ; le moindre KO gaspillant six longues heures de récupération. Parallèlement, il sera heureusement possible de recruter divers compagnons – jusqu’à trois à la fois – dont la puissance ira, elle, en s’améliorant, notamment grâce aux armes et armures qu’on leur fournira. Il s’effectue donc au fil de la partie une sorte de passage de témoin fort original, et la construction d’une équipe efficace devient une priorité pour compenser la déchéance programmée de son leader.


Essaye encore !

Notons que malgré son qualificatif d’anti-RPG, les mécaniques de base de Hero must die. again demeurent solidement ancrées dans le genre, en particulier son système de combat au tour par tour. L’ensemble n’est certes pas spécialement profond, néanmoins, cela s’avère suffisant vu la structure du titre qui privilégie les sessions courtes et répétées, ne permettant pas de développer un gameplay trop complexe. Cette accessibilité se ressent d’ailleurs également dans l’exploration, qu’il s’agisse des villes de taille réduite et généralement d’un seul tenant, ou des donjons constitués d’un maximum de douze zones interconnectées ; les déplacements se faisant quant à eux en vue de côté, façon Valkyrie Profile. Enfin, on ne peut pas dire que la grosse dizaine de lieux disponibles ou le casting composé de seulement treize personnages principaux, dont une majorité de jeunes femmes pouvant faire l’objet de brèves romances, témoignent d’un contenu très copieux. Le bestiaire s’en sortant un peu mieux en ayant toutefois recours à son lot de clones colorés.

Pourtant, tous ces éléments s’imbriquent plutôt bien et forment un système efficace, se rapprochant presque d’un jeu d’arcade par certains côtés. Les parties ne durent en effet qu’une poignée d’heures réelles : en moyenne trois ou quatre dans le cadre de ce test, même si cela dépendra de l’approche de chacun. Lors du premier essai, on visite ainsi la région, on fait la connaissance des habitants et on tente de finir quelques quêtes, en explorant au passage un ou deux donjons. Notre héros perd cependant rapidement ses forces et finit par mourir au bout des cinq jours, ses funérailles étant marquées par l’éloge funèbre de ses proches, suivi d’un texte nous expliquant ce qu’il est advenu du Royaume de Robilia. On fait alors une seconde tentative, puis une troisième et une quatrième, apprenant peu à peu à optimiser les déplacements, la composition d’équipe et l’ordre dans lequel remplir les différents objectifs afin de tenter d’obtenir une meilleure conclusion. Cela jusqu’à débloquer la « vraie fin » faisant la lumière sur le destin du protagoniste et de sa dulcinée.


Impression de déjà-vu

Outre les variations scénaristiques, parfois légères, propres à chaque dénouement, un double score nous est également attribué en fonction du nombre de personnes en deuil ou en pleurs. On peut même conserver les enregistrements de ses funérailles et les visionner par la suite, voire les classer, les renommer ou sélectionner ses préférés. De ce point de vue, il est clair que Hero must die. again ne ressemble pas vraiment à un RPG type, et dans l’absolu, il s’agit plutôt d’une force. Le souci, c’est qu’on fait tout de même vite le tour de ce qu’il propose, les sessions devenant alors très répétitives et ne se distinguant que par de rares éléments aléatoires. L’ensemble reste plaisant à jouer, toutefois, on aurait sans doute aimé davantage de lieux, de personnages et d’événements uniques, de manière à redonner un second souffle au gameplay. Le titre aurait ainsi pu intégrer des mécaniques de roguelike encore plus poussées et renouveler son intérêt sur la longueur.

Il est d’ailleurs relativement frustrant de se rendre compte que le lien entre les actions réalisées et la fin obtenue n’est pas toujours évident, et qu’on ne sait pas si la partie en cours va nous permettre de débloquer une conclusion inédite, parmi la cinquantaine disponible. Malgré une durée de vie théorique s’étalant sur plusieurs dizaines d’heures, il est donc probable que la plupart des joueurs s’arrêtent une fois la vraie fin obtenue ou la galerie de l’Angel Menu complétée ; cette dernière permettant au passage de voir l’avancement des relations entre le héros et ses différents alliés (recrutement dans l’équipe, romance et quêtes réalisées). Quant à la présente critique, elle a été rédigée après sept essais, étalés sur une grosse vingtaine d’heures, le sixième ayant permis de connaître le fin mot de l’histoire. Correct, mais pas transcendant vu la quarantaine d’euros demandée sur l’eShop.


Mignon, mais répétitif

D’autant que côté réalisation, on se retrouve devant le simple remaster HD d’un jeu PlayStation Vita, techniquement modeste, bien que très propre visuellement. La direction artistique colorée ainsi reste plaisante, avec un character design revu par Tetsu Kurosawa (Demon Gaze 1 et 2, Operation Abyss : New Tokyo Legacy) qui s’éloigne clairement celui de Shunya Yamashita, à l’œuvre sur la version de 2007, et joue ostensiblement la carte du fan service en proposant des héroïnes aux décolletés plongeants. Quant à la bande-son, elle se distingue par des voix japonaises de qualité et de jolies compositions du célèbre Kenji Ito (Mystic Quest, la série des SaGa ou Puzzle & Dragons), ayant lui aussi travaillé sur le titre original. Malheureusement, difficile de ne pas ressentir une certaine lassitude en explorant inlassablement les mêmes environnements et en croisant les mêmes personnages.

Outre une absence de traduction française, pas forcément dommageable vu l’accessibilité de l’écriture, cette répétitivité fait de Hero must die. again une expérience particulière, plutôt réservée un public amateur de curiosités. Si le concept de base est très original et que son exécution s’avère efficace, le manque de contenu se fait en effet rapidement ressentir. À tel point d’ailleurs qu’au bout de quelques sessions, on arrive à suffisamment bien optimiser sa progression pour se retrouver, dès que le quatrième jour, sans grand-chose d’autre à faire que des parties de pêche. On peut certes saluer le travail réalisé sur le remake de 2016 et son remaster HD, qu’il s’agisse du passage en 3D, de l’ajout d’éléments scénaristiques ou de personnages inédits, voire de l’intégration des doublages. Néanmoins, il en aurait sans doute fallu encore davantage afin de donner sa pleine mesure à un système au potentiel considérable. Malgré les qualités bien réelles du jeu, on incitera donc les acheteurs à bien se renseigner avant de débourser une quarantaine d’euros.

 

Conclusion : PEUT-ÊTRE !

Avec son concept original, nous mettant dans la peau d’un héros s’affaiblissant peu à peu jusqu’à sa mort inéluctable, le bien nommé Hero Must Die. again propose une expérience plaisante qui finit malheureusement par trouver en rond en raison d’un manque de contenu. Si le principe des parties successives, permettant d’accéder à différentes conclusions en fonction des actions réalisées, est plutôt efficace dans l’absolu, pas sûr que les rôlistes qui céderont à la curiosité aient la patience de débloquer la cinquantaine de fins disponibles. Un jeu fort sympathique, donc, mais à acheter en connaissance de cause, surtout vu son tarif relativement élevé sur l’eShop.

LES PLUS : 

+ Concept original
+ Gameplay simple, mais efficace
+ Réalisation plutôt mignonne
+ Bande-son de qualité
+ Rejouabilité et durée de vie (dans l’absolu)

 

LES MOINS :

– On aurait clairement aimé plus de contenu
– Manque général de profondeur
– Rapidement répétitif
– Plutôt sobre techniquement
– Uniquement en anglais

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Le système de verdict de Nintendo-Difference repose sur trois niveaux :

– “OUI !”

Nous recommandons l’achat de ce titre. Peu importe quel joueur vous êtes : vous l’apprécierez, à condition de ne pas être hermétique au genre.

– “PEUT-ÊTRE…”

Nous recommandons de bien lire le test avant d’acheter le jeu, car il peut ne pas correspondre à tout le monde, et ce pour des raisons qui peuvent largement être différentes d’un jeu à un autre. Par exemple, un titre peut être tout à fait exceptionnel et obtenir un “PEUT-ÊTRE…” parce qu’il se classe dans un genre de niche qui ne correspondra pas à tout le monde alors qu’un autre pourra s’avérer vraiment moyen et à ne réserver qu’aux puristes du genre ou aux fans inconditionnels (comme dans le cas d’une adaptation par exemple).

– “NON !!!”

Nous ne recommandons pas l’achat de ce jeu. Trop mauvais ou trop cher pour ce qui est proposé.

Nous avons abandonné l’idée des notes, car celles-ci n’aident en rien à faire un choix. Avec ce système vous savez si vous pouvez acheter les yeux fermés, s’il faut bien lire le test pour savoir si le jeu peut vous convenir, ou s’il faut tout simplement s’enfuir.

  • Nintendo-Difference

    par Draco

    le 26 mai 2020 à 9:08

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