Pokémon Épée et Pokémon Bouclier

En résumé

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  • 15 Novembre 2019
  • 15 Novembre 2019
  • 15 Novembre 2019

L'avis de Greg-sHAOlink & Klaus

Pokémon Épée et Bouclier continue dans une logique de progression incrémentale qui caractérise la série depuis ses débuts. Certaines nouvelles idées, dont les Terres Sauvages en premier chef, permettent de faire entrer Pokémon dans l’ère contemporaine des autres grandes productions vidéoludiques, mais restent cependant amarrées à une réalisation technique et des mécaniques de jeu qui l’empêchent de vraiment être à la page. D’aucuns diront que Pokémon tourne en rond, tandis que d’autres discerneront le fait que Game Freak se déplace tout de même dans la bonne direction. Il s’agit d’un très bon Pokémon, auquel il manque malheureusement une finition digne de ce nom pour en faire un excellent jeu. Espérons, une fois encore, que le prochain épisode fasse le bond en avant nécessaire pour mettre tout le monde d’accord.

Les plus

  • Une aventure principale sympathique à suivre…
  • Le « Dexit » qui ne nuit en rien à la qualité du jeu...
  • Les nouveaux Pokémon, les nouvelles formes, les évolutions exclusives
  • L’ambiance des Arènes
  • Toutes les nouveautés pour entraîner les Pokémon et rendre la progression plus agréable
  • L’idée des Terres Sauvages
  • Localisation et traduction toujours de qualité
  • De très bonnes musiques
  • Le character design et la direction artistique de façon générale
  • La personnalisation de l’avatar

Les moins

  • … Mais qui aurait mérité d’être plus longue
  • … Mais « Dexit » quand même
  • La réalisation technique souvent à la rue
  • Des fonctionnalités en ligne perfectibles
  • L’exécution du concept des Terres Sauvages
  • Nintendo-Difference

    par Greg-sHAOlink & Klaus

    le 16 janvier 2020 23:00

Toute nouvelle génération des monstres de poche est spéciale, que ce soit par ses attentes comblées et trahies, ses régions et mécaniques de jeu inédites, ses améliorations techniques plus ou moins convaincantes, et, bien sûr, son ensemble de bestioles à découvrir pour la toute première fois. Cette huitième génération a cristallisé encore plus qu’à l’accoutumée toutes les espérances et les critiques à l’approche de la sortie du jeu, d’une part car il s’agit du premier épisode canonique original à sortir sur console de salon (Let’s Go étant un remake), et d’autre part car il s’agit en même temps du premier épisode canonique à ne pas proposer l’intégralité du Pokédex National, autrement dit une véritable hérésie pour certains. Après une septième génération tropicale qui a laissé beaucoup de fans sur leur faim, il était clairement l’heure pour Game Freak de frapper un grand coup et de donner à sa série phare toute la dimension qu’elle mérite… Ou du moins, tels étaient les espoirs des Dresseurs du monde entier avant la parution de Pokémon Épée et Pokémon Bouclier. Et comme à chaque fois, tandis que certains ont été satisfaits, d’autres ont été froidement douchés.

Test rédigé à quatre mains par Greg-sHAOlink et Klaus, après presque 500 heures de jeu cumulées

Pikachu en tenue de Galar

Après quatre régions japonaises, New York, la France et Hawaï, l’aventure Pokémon nous emmène cette fois-ci dans une zone inspirée de chez nos voisins d’outre-Manche, Galar. Tout commence dans le petit village champêtre de Paddoxton, où il ne se passe pas grand-chose, comme dans tous les villages de départ. Mais qu’à cela ne tienne, le reste de la contrée vit et bouillonne au rythme des combats Pokémon, véritable sport national, et c’est ce qui va servir de ligne conductrice au personnage principal. Son but va encore une fois être de devenir le Maître de la région. Il ou elle va en effet devoir partir réaliser le Défi des Arènes, qui consiste à battre huit Champions dans leurs stades – dignes des plus grands de la Premier League anglaise –, pour obtenir leur Badge et ainsi avoir le droit de défier le Maître de Galar, Tarak (qui s’avère être le frère du rival, Nabil). C’est d’ailleurs lui qui mettra le joueur face au choix ô combien important du starter (et non pas le Professeur régional), phase initiale de tout Pokémon qui se respecte.

Outre la compétition sportive, un mystère lié aux Pokémon légendaires constitue l’autre trame scénaristique de cet épisode, relégué au second plan pendant la majeure partie de l’aventure, avant de prendre toute son importance dans les derniers moments de celle-ci et de se résoudre enfin dans le post-game. Si le scénario en lui-même est toujours aussi peu excitant et assez bancal dans son ensemble, le rythme est en revanche très bien maîtrisé et suffisamment soutenu pour ne laisser aucun temps mort. L’autre réussite de l’intrigue réside dans ses personnages, qui sont dans l’ensemble beaucoup plus réalistes que par le passé, en ce sens qu’ils apparaissent tous assez régulièrement durant l’aventure avec leurs propres enjeux existentiels et ne se cantonnent plus à une seule apparition ou à un seul rôle spécifique.

On regrettera cependant l’inutilité totale de la Team Yell (à l’exception de sa leader), qui ne se résume qu’à une bande de hooligans lourdauds tout juste capables de baliser certaines routes inaccessibles pour un temps.

Il faudra compter une vingtaine d’heures pour voir le fin mot de l’histoire, ce qui est un peu chiche quand on s’aperçoit que le jeu ne propose par ailleurs que très peu de quêtes annexes. Compléter le Pokédex et finir le jeu à 100 % prend moins d’une centaine d’heures, ce qui n’est pas loin d’être une première dans l’histoire de la série. Cela n’aurait cependant été un problème que s’il n’y avait pas eu de compensation ; heureusement, Épée et Bouclier proposent de nouvelles mécaniques de jeu tout aussi chronophages que les classiques missions secondaires d’autrefois pour rehausser la durée de vie et la rejouabilité.

À la conquête du Graal de Galar

Toujours dans le but de proposer des nouveautés et avancées dans ses nouveaux jeux, Game Freak a eu l’idée d’incorporer ce qui s’apparente à un aspect « monde ouvert » dans Épée et Bouclier : les Terres Sauvages. Longuement présentées au cours de la communication autour des jeux, elles sont accessibles dès les premières heures et relient différentes villes de Galar que l’on peut explorer pour rencontrer, combattre et capturer des Pokémon. Certains apparaissent exclusivement dans ces Terres Sauvages et plusieurs d’entre eux sont très rares, tandis que d’autres ont un taux d’apparition très élevé. De plus, les Pokémon de chaque zone ne sont pas les mêmes en fonction des conditions météo, qui changent aléatoirement tous les jours. À la manière de différents RPG comme Xenoblade Chronicles, il est possible de rencontrer des Pokémon avec un niveau pouvant aller jusqu’à 60 dès le début de l’aventure.

Pour ne pas rendre les Terres Sauvages beaucoup trop libres, bien que ces Pokémon puissent être vaincus (qu’ils apparaissent directement dans la nature ou avec un point d’exclamation dans les hautes herbes), ils ne peuvent pas être attrapés dès le départ. En effet, il faudra attendre d’obtenir la totalité des Badges pour tenter d’attraper les Pokémon les plus puissants. Bien sûr, plus on obtient de Badges, plus on peut attraper des Pokémon de haut niveau. D’ailleurs, pour éviter la frustration dans certains cas, si l’on rencontre des Pokémon dont le niveau est plus élevé par rapport à celui qui nous est imposé par la limite des Badges que l’on possède, ils ne seront jamais chromatiques. Ainsi, il est impossible de rencontrer un chromatique de cette façon, et si on souhaite le rechercher, il faut donc attendre d’avoir suffisamment de Badges.

Parmi les autres particularités des Terres Sauvages, il y a la possibilité de contrôler librement la caméra, une première dans la série principale. Cela peut être utile par exemple pour trouver de petits Pokémon ou des objets bien cachés (certains, qui sont renouvelés chaque jour, étant d’ailleurs dissimulés sous des points brillants). Il y a aussi les raids Dynamax, un autre point central de la communication autour des jeux. Un peu de la même manière que les Raids de Pokémon GO, il est donc possible de combattre différents Pokémon avec d’autres joueurs. Il y a bien entendu des différences importantes, puisque ces Pokémon sont tous imprégnés de la puissance Dynamax, les rendant invariablement géants, et jusqu’à trois joueurs en ligne au maximum (des joueurs choisis au hasard dans le monde ou en sélectionnant un mot de passe, puis en le donnant à d’autres joueurs de la liste d’amis de notre console pour qu’ils puissent nous rejoindre) ou en local peuvent nous rejoindre pour combattre le Pokémon en question.

Et si personne ne nous rejoint, ou si l’on souhaite simplement faire des raids en solo, le jeu choisira automatiquement des Dresseurs de soutien gérés par l’ordinateur. On regrettera cependant l’inutilité de certains d’entre eux, puisque leurs Pokémon peuvent être très facilement vaincus en un seul tour. Cela peut devenir compliqué pour les raids à cinq étoiles (les plus difficiles), et il est donc souvent nécessaire de faire plusieurs essais et d’espérer que d’autres joueurs puissent nous rejoindre en ligne. À noter qu’en plus de pouvoir capturer les Pokémon des raids, le jeu offre à chaque fois plusieurs récompenses, que l’on arrive, ou non, à capturer les créatures.

En parlant des fonctionnalités en ligne, tout se fait via la fonctionnalité Comm-Y, gérée par le Motismart, une sorte de version améliorée du Motisma-Dex, qui s’occupe également de tous les paramètres du jeu, de l’équipe de Pokémon, du Pokédex, du Cadeau Mystère pour recevoir les récompenses et des combats en réseau. C’est grâce à la fonction Comm-Y que l’on peut participer à des raids, mais aussi faire des échanges avec d’autres joueurs au hasard en ligne, ou en sélectionnant un code, puis en le donnant à la personne avec qui on souhaite faire l’échange. Il a fallu faire cependant ses adieux à la Global Trade Center, qui a été complètement remplacée par Comm-Y. Une disparition quelque peu regrettable, mais qui n’empêche pas non plus de remplir le Pokédex, puisqu’il y a par exemple l’Échange Miracle qui permet d’envoyer un de nos Pokémon en ligne afin qu’il soit échangé avec celui d’un autre, choisi au hasard par le jeu. Même si les fonctions en ligne restent perfectibles, tout finit par se faire simplement et rapidement, de manière accessible, et remplir le Pokédex grâce à tout cela n’a jamais été aussi rapide.

Les épices des Terres Sauvages

Parenthèse fermée sur les fonctionnalités en ligne et retour aux Terres Sauvages. Bien que la zone représente une avancée considérable pour Pokémon, on est encore loin de la liberté totale offerte par un The Legend of Zelda : Breath of the Wild, ou de son écosystème qui immerge le joueur par sa crédibilité et son réalisme. D’un côté, on ne trouve pas d’endroits cachés, de routes dérobées, de parties à explorer sur plusieurs niveaux, que ce soit en hauteur de montagnes ou dans des cavernes souterraines : c’est un très grand bac à sable, très amusant à découvrir, mais qui ne demande aucun effort à explorer, puisque tout est plus ou moins à portée de main. De l’autre côté, les Terres Sauvages sont découpées au laser en plusieurs zones ayant chacune leur propre météo et biome, sans aucune logique apparente : on passe d’une tempête de sable, à un grand soleil, puis de nouveau à une tempête de sable simplement en faisant quelques pas en avant ou en arrière, selon que l’on est dans une zone X ou Y. Même le nuage de Tchernobyl ne s’était pas arrêté aussi nettement à la frontière…

Le problème est que l’impression de véritablement traquer les Pokémon dans leur monde se retrouve réduite, voire anéantie, du fait de ces choix techniques qui enlèvent toute vraisemblance à l’univers. Par ailleurs, il faut aussi avouer qu’outre les raids et la recherche, les combats et la capture des Pokémon sauvages, les Terres Sauvages sont vides. On y trouve bien quelques marchands, à qui l’on peut acheter des Disques Techniques (des Capsules Techniques à usage unique), des Morceaux d’Étoile (pour démarrer un raid dans un antre vide) ou des Balls spéciales, faire un mini-jeu de course de vélo, ou encore demander aux Trou Brothers de creuser afin de dénicher des objets rares (notamment des fossiles), mais c’est bien peu. Alors oui, on peut aussi « interagir » avec les autres joueurs qui se promènent dans les Terres Sauvages ou même faire du Poké Camping avec eux, mais cela ne représente au mieux qu’un gimmick.

Le Poké Camping est une autre nouveauté qui remplace en quelque sorte la Poké Récré de X/Y et la Poké Détente de Soleil/Lune et Ultra-Soleil et Ultra-Lune. Ici, il n’est plus question de caresser et nourrir les Pokémon de notre équipe individuellement, mais de les voir agir entre eux ou avec nous, en discutant et en jouant avec différents jouets. On peut se surprendre à y passer du temps, rien que pour voir la véritable personnalité de nos Pokémon préférés ou leurs réactions adorables, mais surtout pour l’autre nouveauté cachée derrière le Poké Camping : le curry, l’un des plats les plus populaires de Galar. On peut donc cuisiner du curry à travers un mini-jeu somme toute addictif, où il faut d’abord choisir un ingrédient parmi ceux que l’on possède (à acheter dans les Terres Sauvages ou en parlant aux Dresseurs en ligne, qui peuvent nous offrir des objets, dont lesdits ingrédients pour le curry), puis une Baie. 

Ensuite, pendant la cuisson, il faut agiter un éventail jusqu’à obtenir une flamme satisfaisante tout en faisant attention à ne pas trop exagérer pour éviter que cela crame. Le mini-jeu se termine avec deux étapes : mélanger le plat, puis envoyer un cœur, seul ou à plusieurs en ligne ou en local, afin d’obtenir un curry noté jusqu’à cinq étoiles. En fonction des ingrédients, des Baies et de notre performance pendant le mini-jeu, il est ainsi possible d’obtenir un curry plus ou moins parfait. Cela permet de remplir le Currydex, renfermant plus de cent types de plats, mais aussi de faire regagner aux Pokémon leurs points de vie, leurs PP et les faire devenir plus amicaux.

Grandeur et décadence, qualité vs. quantité

Toujours au rayon des « nouveautés » se trouvent les Arènes-Stades mentionnées précédemment. Peu de gens avaient apprécié les Épreuves de la septième génération et le retour aux Arènes n’est pas pour déplaire. Même si le but reste toujours de récolter huit Badges, puis finir par tenter de devenir Maître, les développeurs ont également imaginé plusieurs nouveautés importantes pour les Arènes en adéquation avec le tournoi Poké Masters, dans lequel s’affrontent les tout meilleurs Dresseurs de Galar. Plus grandes que dans les anciens jeux, les Arènes sont aussi toutes vraiment uniques, grâce notamment à un système d’épreuves en plus des combats contre les Dresseurs, et non pas un simple enchaînement de batailles avec un petit lot d’énigmes.

Ces épreuves s’apparentent à des mini-jeux sympathiques, certaines proposant d’ailleurs de bonnes idées comme la cinquième arène, bien que l’on aurait apprécié certaines épreuves plus longues, surtout vers la fin de l’aventure. Il y a aussi deux Arènes différentes en fonction des jeux, avec aussi des personnages différents, et bien sûr, après avoir terminé chaque épreuve, il faut combattre le Champion. Les combats contre les Champions font d’ailleurs partie des éléments les plus réussis de cette nouvelle génération, grâce à leur ambiance et à la musique évolutive. À moins d’avoir une équipe beaucoup trop puissante, les combats contre les Champions d’Arène sont souvent intenses, et se terminent obligatoirement avec le dernier Pokémon dynamaxé ou gigamaxé du Champion.

La taille des Stades va de pair avec la nouvelle mécanique de combat instaurée par Pokémon Épée et Bouclier, à savoir le phénomène Dynamax. Sorte de fusion entre les Méga-Évolutions et les capacités Z, le phénomène Dynamax se produit seulement dans certains endroits de Galar : les antres des Terres Sauvages et les Arènes. Cela permet aux Pokémon de devenir géants et d’utiliser un pouvoir immense. Pour faire face aux Pokémon dynamaxés, on peut choisir ou non d’utiliser à notre tour notre propre Pokémon Dynamax. Cependant, cela est possible une seule fois par combat et pendant trois tours (sauf pour les Pokémon Dynamax sauvages, qui restent dans cet état tout le long du combat). En plus d’être bien plus forts, les Pokémon dynamaxés ont accès aux capacités Dynamax, particulièrement puissantes et ajoutant des effets supplémentaires augmentant les statistiques ou infligeant des problèmes de statut, par exemple. 

Il y a également le phénomène Gigamax, qui change l’apparence de plusieurs Pokémon, comme les Méga-Évolutions, en plus de les rendre encore plus puissants que le Dynamax. Les Pokémon Gigamax sont bien sûr plus difficiles à obtenir que les Pokémon Dynamax, et il est très souvent nécessaire de les combattre avec d’autres joueurs dans les Terres Sauvages. Grâce aux événements organisés régulièrement par The Pokémon Company et Game Freak, il est possible d’attraper petit à petit chaque Pokémon Gigamax. Si en combats stratégiques en solo le Dynamax pose beaucoup de problèmes en termes d’équilibre (et a d’ailleurs été banni de Smogon, pour les puristes), les débats sont plus modérés en combats duo (format VGC) et la mécanique apporte un éventail de possibilités assez large pour y donner beaucoup d’intérêt.

Cela est en revanche contrebalancé par l’une des pierres d’achoppement du titre, le désormais célèbre « Dexit ». Comme nous l’avions appris plusieurs mois après la révélation des jeux, étant donné qu’avec chaque espèce de Pokémon et leurs différentes formes on dépasse facilement les mille créatures, Game Freak a fait le choix de ne pas inclure tous les Pokémon dès le départ dans les premiers nouveaux jeux principaux sur Switch, une décision sur laquelle l’équipe dirigée par Junichi Masuda et Shigeru Ohmori réfléchissait depuis longtemps, en commençant tout d’abord par ne pas inclure de Pokédex National à partir de Soleil et Lune (tout en conservant les modèles des Pokémon déjà conçus depuis X et Y).

Ainsi, au lieu de permettre de rencontrer et transférer l’intégralité des Pokémon existants, les jeux contiennent « seulement » quatre cent Pokémon, sans compter les différentes formes de certaines créatures. Parmi eux, il y a bien sûr de nombreux Pokémon inédits de la nouvelle région, une grande sélection de plusieurs Pokémon d’anciennes générations (principalement la cinquième, un choix logique compte tenu du lien « anglais » entre Galar et Unys), mais aussi des Formes de Galar. Contrairement aux Formes d’Alola, celles de Galar ne se limitent pas à la première génération ni aux Pokémon les plus populaires de tous les temps, ce qui est déjà un point largement positif.

« Y’a pas Aspicot, c’est un scandale » (Des Pokéfans désabusés (2019))

On peut citer également les Formes Gigamax, dont certains Pokémon, là aussi de différentes générations, ont pu profiter. Il y a aussi de très bonnes idées dans le design, la personnalité et les formes de la plupart des Pokémon inédits, ce qui les rend tous uniques et attachants. Pour ne pas tous les citer, il y a bien sûr les Pokémon de départ et leurs évolutions, mais aussi Moumouton et Voltoutou, qui sont devenus de véritables icônes, ou encore Bekaglaçon, Hexadron, Frissonille, la famille de Charbi, Verpom, Grimalin, Bibichut, Toxizap, Fantyrm… Sans oublier les formes régionales de Corayon, Canarticho, M. Mime, Darumarond, Zigzaton ou bien Tutafeh, certains profitant d’ailleurs d’une évolution exclusive, jamais apparue dans les autres générations, une première dans la série puisqu’il s’agit en plus d’une forme exclusive de la région dans ce cas présent, ce qui rend Galar encore plus unique.

Et enfin, les Formes Gigamax regorgent d’excellentes idées dans le design de ces Pokémon géants que l’on peut voir uniquement dans les raids. Que ce soit l’imposant Lokhlass, le gratte-ciel Duralugon, le Miasmax et ses jouets immenses, ou encore la soucoupe volante Astronelle, on ne peut que les aimer. Bien évidemment, parmi tous ces Pokémon et toutes ces formes uniques, il y a des exclusivités en fonction des versions, ce qui invite à communiquer avec d’autres joueurs et à utiliser les différentes nouveautés pensées pour Épée et Bouclier.

Dans le même temps, on apprécie la contribution de nombreux artistes, autant pour le design des Pokémon que pour ceux des personnages humains, dont plusieurs qui participent activement au Jeu de Cartes à Collectionner, et qui ont su créer des créatures hautes en couleur, mais aussi certains que l’on ne retrouve habituellement pas dans les jeux Pokémon, tels que Haruko Ichikawa, la talentueuse créatrice du manga L’Ère des Cristaux (qui travaille pour Game Freak depuis Soleil et Lune), ou encore take (Katanagatari, Zaregoto, Death March Club), qui avait lui aussi travaillé sur Soleil et Lune, ainsi que Yusuke Kozaki, que l’on ne présente plus depuis qu’il a fortement gagné en popularité grâce à No More Heroes et Fire Emblem, et qui a conçu plusieurs Pokémon.

On salue également tous les efforts fournis dans la localisation et la traduction, que ce soit dans l’adaptation des dialogues ou des noms des Pokémon, d’autant plus qu’au fil des années, les équipes en charge de tout le travail colossal demandé ont changé, a fortiori ces dernières années puisque nous avons droit désormais à des sorties mondiales. On pense par exemple aux noms de certains Pokémon, comme Tutétékri, l’évolution exclusive du Tutafeh de Galar, qui suit parfaitement la lignée de la traduction française de Noir et Blanc, opérée à l’époque par Cyril Schultz, Pierre Bancov (notamment connu pour son travail sur Le sanglot des cigales), Guillaume Didier, Antonin Bechler et Pascal Ehret. C’est aussi grâce à tout ce travail de traduction, effectué cette fois-ci par de nouvelles personnes, Olivia Bonnal, Olivier Hagué, Lylia Khrissate, Aymeric Forgit et Sarah Provost, accompagnées du vétéran Guillaume Didier, que l’on s’attache aux jeux Pokémon et qu’ils nous font rire ; Galar est bien loin d’échapper à cette norme.

Finalement, malgré une sélection limitée de Pokémon, et à moins d’être un aficionado absolu d’un monstre coupé au montage, on ne peut que constater une répartition plus que réussie de l’ensemble du bestiaire, que ce soit pour les anciennes têtes comme pour les nouvelles, en termes de types, de générations et d’équilibre pour les combats. Et les futurs DLC permettront de compléter encore davantage une sélection déjà bien garnie, mais ne fera pas taire pour autant les joueurs qui se sont appropriés la série comme étant la leur et non celle des développeurs…

Un vrai (Co)confort de jeu

Outre tous ces changements et nouveautés importants au niveau des mécaniques constitutives de la série, Game Freak a aussi fait des efforts pour optimiser la qualité de vie de son dernier-né avec des améliorations pour la plupart bienvenues. Citons tout d’abord l’accès aux Boîtes PC à n’importe quel moment, à l’instar de Pokémon : Let’s Go, qui est d’une logique évidente et qui a heureusement été conservé pour Épée et Bouclier : plus besoin de retourner dans un Centre Pokémon pour changer de Pokémon dans son équipe, permettant de remplacer aisément ses compagnons en fonction des forces et faiblesses à prendre en compte quant à la zone où l’on se trouve. Les développeurs ont également eu la bonne idée de donner quelque chose à faire à la dizaine, voire centaine(s) de Pokémon qui restent autrement oisifs dans ces Boîtes, par le biais du Poké Service.

En guise de remplacement de Poké Loisir (introduit dans Soleil et Lune), Game Freak a conçu cette nouveauté pour obtenir des récompenses, améliorer les statistiques des Pokémon et faire monter leur niveau en les envoyant participer à des missions qui durent plusieurs heures. Ces missions, en plus d’approfondir le lore de Galar à travers des entreprises que l’on ne voit pas forcément dans le jeu habituellement, permettent aux Pokémon que l’on garde dans les Boîtes PC d’avoir eux aussi un rôle dans l’aventure. On aurait peut-être aimé plus d’interactions avec les Pokémon, comme dans Poké Loisir par exemple, mais avec tout ce que les jeux proposent en dehors, on ne peut qu’être satisfait par l’utilité du Poké Service.

Du côté de l’entraînement des Pokémon, le Multi Exp. est dorénavant automatique et impossible à désactiver, ce qui ne manquera pas de faire grincer les dents de certains. Les Pokémon de l’équipe obtiennent tous de l’expérience, même s’ils ne participent pas au combat, et on ne peut rien faire pour l’empêcher. Heureusement, la difficulté naturelle du titre est plutôt bien calibrée pour que cette fonctionnalité ne rende pas la progression trop aisée. Par ailleurs, et toujours dans un souci de rendre certaines fonctionnalités plus pratiques, il suffit désormais de se rendre dans n’importe quel Centre Pokémon et de parler au barista pour oublier ou ré-enseigner une capacité, ou encore pour donner un surnom à ses Pokémon, au lieu de devoir trouver un PNJ dans un lieu unique et bien spécifique, comme dans les précédents jeux.

Les stratèges seront eux ravis d’apprendre que la création d’un Pokémon parfait n’a jamais été aussi facile. Les plus pressés n’auront plus à passer des heures entières à tourner en rond devant la Garderie pour y faire éclore des Œufs aux IV et natures parfaites. En effet, des Aromates sont maintenant disponibles afin de changer la nature d’un Pokémon à la volée. Couplés aux Capsule Argent/Or qui augmentent artificiellement les IV pour les monter au maximum, il est possible de créer son Pokémon parfait uniquement à l’aide d’objets (que l’on peut acheter à la Tour de Combat, en post-game). Et pour couronner le tout, le transfert des capacités Œufs (capacités qu’un Pokémon ne peut normalement pas apprendre par lui-même et qui doivent être transmises par un Pokémon d’une autre espèce) a également reçu un traitement de faveur : si son Pokémon parfait n’a pas appris la capacité Œuf désirée avant d’être entraîné, il pourra quand même l’apprendre en étant simplement déposé à la Garderie avec un autre Pokémon de la même espèce (et même du même sexe !), qui aurait lui déjà appris cette capacité. Très utile quand on a un Pokémon parfait mais qu’on a oublié de lui apprendre l’attaque qui le rendra imbattable.

« Ils nous ont vendu un jeu pas fini, c’est un scandale » (Des Pokéfans toujours désabusés (2020))

Terminons la liste des améliorations opportunes avec la customisation de l’avatar, qui n’a jamais été aussi convaincante. Il existe à Galar de nombreuses boutiques et salon de beauté qui permettent de personnaliser son héros ou son héroïne à un degré très poussé, via une tétrachiée de vêtements, d’accessoires, de chaussures et autres éléments dignes d’un mini-La Nouvelle Maison du Style.

D’ailleurs, dans les mois qui arrivent, la personnalisation sera encore plus poussée grâce au Pass d’extension, fraîchement annoncé en ce début d’année. C’est une première pour Game Freak, qui sortait plutôt des versions complémentaires jusqu’à Ultra-Soleil et Ultra-Lune en 2017. Ainsi, au lieu de concevoir des suites ou des versions ultimes d’Épée et Bouclier, la nouvelle équipe, dirigée par Hiroyuki Tani (à l’instar d’Ultra-Soleil et Ultra-Lune, qui avaient été réalisés par Kazumasa Iwao pour que les développeurs principaux puissent travailler sur Switch), a préféré choisir la voie des DLC. Une décision qui n’est pas vraiment étonnante, puisqu’en 2017, Iwao avait d’ailleurs indiqué que Game Freak pourrait proposer des mises à jour régulières ajoutant du nouveau contenu pour les futurs titres. 

En plus de permettre aux vétérans de Game Freak de pouvoir prendre plus de temps pour travailler sur les prochains jeux, le Pass d’extension d’Épée et Bouclier, coûtant 29,99 € pour chaque jeu, permettra de retrouver d’anciens Pokémon qui n’apparaissent pas du tout dans les jeux de base, et de rencontrer également des créatures aux formes Gigamax et formes de Galar inédites (y compris pour les Pokémon légendaires !), de profiter d’une nouvelle histoire, de nouvelles zones et fonctionnalités, d’obtenir de nouveaux vêtements, accessoires et coiffures, et bien plus encore.

Ce Pass d’extension sera divisé en deux parties, la première, « L’île solitaire de l’Armure », permettant de découvrir Isolarmure (inspirée de l’Île de Man), est prévue pour fin juin, tandis que celle de la seconde, intitulée « Les terres enneigées de la Couronne », qui introduira Couronneige (inspirée de l’Écosse), sera disponible durant cet automne. De plus, à partir de ce mois de février, l’application Pokémon HOME va arriver sur Switch, iOS et Android, ce qui permettra de transférer les Pokémon apparaissant dans les jeux de base, ainsi que dans les deux parties du Pass d’extension. Le futur d’Épée et Bouclier est donc chargé, et l’annonce de DLC a bien sûr divisé dans la communauté de fans, étant donné que c’est la première fois que Game Freak emprunte ce chemin.

Dans tous les cas, le contenu que l’on a pu apercevoir en ce début d’année reste alléchant (cliquez ici pour en savoir plus), et Game Freak prépare également des mises à jour gratuites pour les personnes qui ne voudront pas se procurer le Pass d’extension (sans compter les événements pour les raids Dynamax). Il ne reste plus qu’à voir tout ce qui est en train d’être préparé en ce moment, mais l’avenir de la série, dans le cas de ces DLC, est plutôt prometteur.

Tempête de sable visuelle et grand soleil sonore

Terminons cette critique sur l’aspect technique du titre. L’exploration de l’ensemble de la carte fait passer le joueur par des plaines pittoresques, des châteaux moyenâgeux, des villes balnéaires ou montagneuses, sans oublier la grande capitale fortement inspirée de Londres, ou encore un petit hameau tout droit sorti d’un conte de fées. Le charme de la direction artistique est indéniable et on s’émerveillerait presque à la découverte de tous ces endroits. Presque, car la technique ne suit pas toujours et a fortiori dans les Terres Sauvages. Le framerate est souvent à la rue, avec des chutes dramatiques, les éléments du décor et les Pokémon sauvages subissent un clipping du niveau de la PlayStation première du nom, certaines textures et modèles 3D font presque honte à la Switch tellement ils sont médiocres, et l’aliasing est au même diapason… Pour parachever cette réalisation technique d’une autre époque, il faut malheureusement noter aussi quelques rares freezes et crashs.

Dans la même lancée, les fameuses animations qui étaient censées être retravaillées intégralement par Game Freak, et qui étaient surtout censées justifier l’absence de la moitié du Pokédex National, sont peu ou prou les mêmes que celles des deux précédents épisodes, ce qui infailliblement a déclenché la colère des fans attentifs aux promesses des développeurs et qui ne se sont pas gênés pour effectuer des comparatifs accablants. Comme trop souvent, Game Freak est en retard techniquement et tout le talent dont ils font preuve pour compenser ces lacunes avec une direction artistique léchée ne suffit cependant pas pour se convaincre du passage à la « nouvelle » génération.

En revanche, si l’aspect visuel est hautement perfectible, il en est tout autrement d’un point de vue musical. Cette fois-ci, les musiques ont été composées par une équipe plus restreinte en termes de compositeurs, surtout par rapport à Soleil et Lune, les vétérans Go Ichinose et Minako Adachi, accompagnés d’un petit nouveau, Keita Okamoto, mais ils ont fait un excellent travail. Les musiques se marient parfaitement aux environnements, les thèmes de combat sont entraînants, et on retiendra bien évidemment surtout celui des Champions d’Arène. Les chœurs, grâce aux acclamations du public notamment, n’avaient jamais été aussi présents, bien que l’on pût déjà en entendre depuis Noir et Blanc. Par ailleurs, la variété des morceaux est très vaste. Pour consacrer le tout, Toby Fox, le très célèbre créateur d’Undertale et Deltarune, a eu la chance, en plus de sa participation pour la bande-son du RPG Little Town Hero, de composer une musique pour Épée et Bouclier.

Bien que l’on puisse en profiter seulement après la fin de l’aventure, c’est un plaisir d’entendre sa contribution, d’autant plus qu’elle correspond totalement à l’univers de Pokémon. On salue également tous les efforts mis dans les effets sonores, la petite équipe d’Hitoshi Okamoto, Hiroki Mogami et Sayaka Yaegashi ayant ajouté de nombreux détails, embellis grâce aux options pour paramétrer le son, rendant le monde de Pokémon plus vivant que jamais. Tout l’aspect musical d’Épée et Bouclier est donc une véritable réussite, aussi grâce à la Switch qui a permis à l’équipe sonore d’avoir encore plus de liberté, et nous avons hâte d’écouter ce qu’elle nous réserve pour le Pass d’extension.

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