Test Nintendo Switch de The Banner Saga, magnifique mais…

The Banner Saga est né d’une campagne participative sur Kickstarter en mars 2012, et ce n’est qu’après avoir récolté plus de sept cent mille euros et près de deux ans de gestation que le titre de Stoic Studio a pu voir le jour. D’abord paru sur PC en janvier 2014, puis sur PS4 et Xbox One deux ans plus tard, il aura fallu attendre le 17 mai dernier pour que les fans du plombier moustachu puissent s’y essayer à leur tour. Disponible pour vingt euros sur l’eShop de la Switch, The Banner Saga se présente comme un Tactical-RPG imprégné d’une grosse dimension narrative, le tout se déroulant dans un univers fantastique et inspiré par le monde viking. Au contrôle de deux caravanes et de leurs héros, la mission du joueur sera de fuir et survivre à l’invasion Dredge. Serez-vous du voyage ?


Un test rédigé par Kalimari.


Je suis né dans cette caravane

Qu’il est difficile de conter l’histoire de The Banner Saga sans trop en dévoiler ! Il faut dire que le jeu possède un background particulièrement généreux, donnant ici et là des descriptions de lieux, dévoilant le passé de personnages majeurs ou la facette de chacun des Dieux de ce monde. S’il se familiarisera progressivement avec cet univers aux inspirations nordiques en avançant dans le scénario, il pourra aussi et surtout en apprendre davantage à l’aide de la carte du monde ; y sont consignés régions, mers, villages et chaines de montagnes, chaque point étant accompagné d’un petit encart écrit. En résulte un univers crédible, lequel parvient dès les premières secondes du titre à immerger le joueur qui le traversera d’un bout à l’autre. S’il fallait vraiment résumer la grandiose histoire qui compose ce The Banner Saga, peut-être faudrait-il la décrire comme une fuite désespérée de deux peuples, Humains et Varls (des géants cornus), face aux hordes Dredges (des humanoïdes au corps de pierre) et un mal bien plus mystique.

Ce ne sont pas les Dieux, déjà morts depuis fort longtemps suite à une guerre intestine, qui leur conféreront protection et bienveillance. Le soleil quant à lui, ne semble plus vouloir se coucher, signe annonciateur de mauvais présages chez les Varls. Et comme si cela ne suffisait pas, il faudra survivre à un rude hiver ; famine, déprime et trahison affecteront leur caravane, certes constituée de soldats, mais aussi et surtout de paysans. Autant le dire tout de suite, fort de sa crédibilité quasi sans faille, The Banner Saga ne propose toutefois que peu d’environnements différents à travers son voyage ; pas mal de montagnes, beaucoup de forêts et de bois mais aussi énormément de neige. Le joueur pourrait y voir là une certaine redondance visuelle, quand bien même le titre peut se targuer d’un travail artistique remarquable. D’une beauté à couper le souffle, le soft s’inspire énormément des travaux d’Eyvind Earle (il y a même un magicien du nom Eyvind en jeu), un grand monsieur ayant endossé le rôle d’animateur pour Walt Disney Pictures, notamment pour La Belle au bois dormant ; on vous invite par ailleurs à admirer quelques-uns de ses tableaux, les similarités avec le jeu étant frappantes.


Wintory is coming

Outre sa plastique avantageuse, quoiqu’un peu rugueuse à l’image de son univers, il faut également souligner tout le pan sonore du titre. Très réussis, les doublages anglais se limitent toutefois au narrateur, les personnages étant de fait muets. C’est d’autant plus dommage qu’à côté de ça, le jeu se montre aussi particulièrement avare en animations ; le voyage des caravanes se compose d’un simple scrolling de gauche à droite ou inversement, les personnages clignent des yeux de temps en temps lors des phases de discussions, et les coups portés ou les déplacements durant les phases d’escarmouches sont rigides. Reste que les bruitages sont assez corrects dans l’ensemble, là où la bande-son émerveille tant elle parvient à insuffler une puissance rare dans des mélodies peu rythmées. Une véritable force tranquille que l’on doit à Austin Wintory, ainsi qu’aux percussions et aux cuivres dominants ponctuellement violoncelles, violons et harpe. Une vraie sensation de guerre et de danger éminent surgissant dans des moments de calme absolu.

Mais The Banner Saga n’est pas qu’un roman, pas plus qu’une peinture ou un concert de musique classique. C’est avant tout un jeu vidéo, et en cela le studio derrière le titre a opté pour un savant mélange de livre dont vous êtes le héros et de tactical. Comprenez par là qu’entre deux joutes sur une grille à la Fire Emblem, il vous faudra – beaucoup – lire et faire des choix souvent injustes, tant sur leur questionnement moral que sur leur débouchée. Pour dire, certains d’entre eux vous priveront d’un de vos personnages en le menant à une mort certaine, suite à une prise de risque inconsidérée ; d’autres feront appel à votre sens de la diplomatie, comme lorsqu’il s’agit d’accueillir ou non de nouveaux membres dans votre caravane. Il faudra alors gérer crise sur crise, notamment des vols ou des meurtres entre les villageois, des disparitions ou des besoins de pause alors que l’armée ennemie vous pourchasse. Toujours très bien écrit en dépit d’une localisation française pas exempte de coquilles, cet aspect du jeu revient peut-être un peu trop souvent en comparaison des combats. 

Dredges loques

Reste qu’il s’agit ici d’un point positif tant les choix modifient vraiment la suite de l’histoire, si ce n’est autant voire plus que certaines productions signées Telltale Games (coucou, Batman). Les plus forts accepteront les répercussions de leurs actes, tandis que les plus faibles pourront abuser du système de sauvegarde pour « expérimenter » les diverses voies scénaristiques offertes. C’est sale, mais ça marche. Le final, complètement bouleversant, assume lui aussi cette vision de la narration tant il coupe littéralement la timeline du jeu en deux. Reste à savoir si le second épisode de la franchise – le test parviendra également sous peu – assumera cette scission scénaristique proposée aux joueurs. Et si l’aspect narratif fonctionne à merveille, c’est un peu moins le cas du côté de son gameplay. Dans The Banner Saga, il est possible de contrôler jusqu’à six personnages différents lors d’un même combat. Chacun d’entre eux possède une classe attitrée, laquelle lui confère des statistiques diverses. Les points de vie servent également de points d’attaque, tandis que les points d’armure empêchent de prendre trop de dégâts ; il est possible de les détruire avec des coups qui y sont dédiés.

Problème, le joueur ne comprendra certainement pas la différence des deux types de dégâts. Alors oui, un superbe tutoriel – court et limpide – a beau tout expliquer, il n’empêche qu’en pratique, on ne sait jamais trop s’il vaut mieux viser les points de vie ou de protection, tant les seconds ne semblent pas vraiment chambouler le calcul des dommages. Ce qu’il faut savoir en revanche, c’est qu’un adversaire possédant plus de points d’armure que les points de vie d’un allié aura plus de chances d’esquiver un coup reçu. Au rayon des mauvaises décisions, il y a aussi l’impossibilité d’annuler une de ses actions au cours d’un même tour, un choix qui surprendra les plus gros fans de tactical ; un mauvais déplacement et c’est tant pis, il faudra faire avec, même si cette erreur peut coûter la victoire. Les points de volonté quant à eux permettront de booster l’attaque, la capacité spéciale ou les déplacements d’une unité, mais ne se régénéreront pas tout seuls ; achever un ennemi conférera un point de volonté dans la Corne de la volonté, une jauge unique qui donnera le choix au joueur de redistribuer ces points à qui il le souhaite.

La faim du monde

Enfin, les points d’effort donnent une idée de combien de points de volonté peuvent être utilisés durant le même tour. À chaque montée de niveau d’un personnage (le niveau max est limité à cinq), il sera possible d’augmenter une ou plusieurs de ses caractéristiques, pour peu que le joueur dispose de suffisamment de points de renommée. Ces points s’acquièrent en réalisant de bons choix lors des phases narratives – comme aider un paysan qui le remerciera en retour – ou à la fin de chaque joute gagnée. Problème, ces points de renommée peuvent – et doivent – être également utilisés pour acheter des vivres dans les villages traversés, sans quoi ceux qui peuplent la caravane mourront de faim ; la famine baisse le moral, qui lui-même réduit les statistiques des personnages jouables, obligés de se battre si la caravane ne dispose plus de soldats pour combattre et vaincre à la place du joueur. Un cercle vicieux que le joueur ne semble pas pouvoir éviter, l’obligeant donc à subir la famine durant tout le dernier quart du jeu (améliorer ses personnages semble être plus vital que de faire survivre sa caravane).

Les dernières batailles se révéleront ainsi épuisantes, mettant à terre nombre des héros du joueur ; vaincus, ils subiront un malus de statistiques. Pour remettre sur pieds sa troupe, il lui faudra établir son camp s’il est en voyage ou se poser dans un village et se reposer jusqu’à trois jours, chaque journée consommant des vivres. Une routine s’installe alors rapidement, le joueur enchaînant trop souvent une phase narrative par une phase de combat et une phase de repos. S’il est assez facile en Normal jusqu’à son dernier quart de jeu, The Banner Saga devient soudainement plus vicieux, la faute à des personnages trop souvent blessés. Le boss final étant par ailleurs décevant, le jeu ne renouvelle que très peu ses scénarios de combat, appuyant davantage sur la répétitivité du titre. Ce ne sont pas les équipements qui rendront la chose plus facile, surtout en mode Difficile, puisque coûtants la peau des fesses en points de renommée. Quand on voit tout ce que propose aussi généreusement The Banner Saga, impossible de ne pas regretter toutes ces errances dans les choix de game design et ce manque de profondeur dans le gameplay.

 

Conclusion : PEUT-ÊTRE !

The Banner Saga est beau à en couper le souffle. Musicalement, c’est également une grande claque. D’un point de vue scénaristique, c’est crédible, immersif et bien écrit, quoiqu’un peu mal traduit. Non, vraiment, le titre de Stoic Studio est quasiment parfait sur tout son plan artistique, c’est un fait. Malheureusement, le jeu se prend les pieds dans le tapis dès lors qu’il s’agit d’y insérer un tant soit peu de gameplay. Les combats y sont mous, mal dosés et surtout trop redondants. Les choix ont un réel impact, mais tous paraissent injustes, surtout quand ils influent sur les vivres des deux caravanes que contrôle le joueur. Une survie par ailleurs assez étrange, comme s’il était impossible de ne pas perdre la moitié des siens à cause de la famine. Reste que le voyage et l’ambiance instaurée ne cessent de prendre à la gorge de celui ou celle qui le traversera ; la fin, qui invite à revenir pour la suite, en est un parfait exemple. Comptez environ neuf heures pour finir le jeu en ligne droite, plus si vous désirez effectuer des choix narratifs différents. Ne le prenez pas pour un Tactical-RPG, mais bien plus pour un livre dont vous êtes le héros, un rôle dans lequel il excelle.

LES PLUS : 

+ La direction artistique, sublime
+ Une superbe bande-son
+ Un scénario qui tient en haleine
+ Un univers crédible et immersif
+ Des choix moraux terribles et qui impactent l’histoire
+ Une rejouabilité assez intéressante
+ Un portage de qualité

 

LES MOINS :

– Un bestiaire et des combats qui ne se renouvellent jamais
– L’aspect jeu de rôles trop léger, presque oublié
– L’ergonomie des menus et des actions en combat
– Une difficulté et un équilibrage général très étranges
– Un poil trop routinier dans sa progression
– Des animations trop statiques et des personnages non doublés
– Quelques coquilles dans la traduction française

_______________________________________________________________

Le système de verdict de Nintendo-Difference repose sur trois niveaux :

– OUI ! (nous recommandons l’achat de ce titre, peu importe quel joueur vous êtes : vous l’apprécierez, à condition de ne pas être hermétique au genre ou à l’univers). Le Oui accompagné du ND Award récompense les titres soit exceptionnels que vous devez acheter quoiqu’il arrive, soit ceux nous ayant provoqué de gros coups de coeur !

– “Peut-être” (nous recommandons de bien lire le test avant d’acheter le jeu, car il peut ne pas correspondre à tout le monde, et ce pour des raisons qui peuvent largement être différentes d’un jeu à un autre). Par exemple, un titre peut être tout à fait exceptionnel et obtenir un “Peut-être” parce qu’il se classe dans un genre de niche qui ne correspondra pas à tout le monde alors qu’un autre pourra s’avérer vraiment moyen et à ne réserver qu’aux puristes du genre ou aux fans inconditionnels (comme dans le cas d’une adaptation par exemple).

– NON (nous ne recommandons pas l’achat de ce jeu). Trop mauvais ou trop cher pour ce qui est proposé.

Nous avons abandonné l’idée des notes, car celles-ci n’aident en rien à faire un choix, avec ce système vous savez si vous pouvez acheter les yeux fermés, s’il faut bien lire le test pour savoir si le jeu peut vous convenir ou s’il faut tout simplement s’enfuir.

  • Nintendo-Difference

    par Draco

    le 12 juillet 2018 à 6:33

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  • Sorties :
  • 17 Mai 2018
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