RiME

En résumé

  • Sorties :
  • 17 Novembre 2017
  • 14 Novembre 2017
  • 16 Novembre 2017

L'avis de Chozo

Œuvre magnifique, si riche et si bien scénarisée, qu'une adaptation cinématographique serait tout à fait justifiée, RiME est un jeu qui marque indéniablement les esprits... Sur une autre console que la Switch. Involontairement plus difficile que sur d'autres supports, cette version met les nerfs et la patience du joueur à rude épreuve, la faute à un choix de portage honteusement mal calibré. Oui, la Switch est moins puissante et nécessite une adaptation à son architecture particulière. Oui, RiME reste infiniment plus immersif sans temps de chargement entre les différents sites de l'île. Mais il demeure incompréhensible que le rendu définitif de cette version Switch soit passé par les accords des patrons de Tantalus et surtout la validation de Nintendo, passablement beaucoup plus exigeant pour d'autres titres, en témoigne l’excellent Morphite, obligé de revoir sa copie suite aux prescriptions de la firme de Kyoto. De plus, il est incroyable de penser que le décalage de sortie de plusieurs mois de cette version par rapport aux autres supports ait pu aboutir à un telle catastrophe, qui plus est à un prix plus élevé que la concurrence. Ce jeu aurait pu simplement connaître le syndrome Shadow of the Colossus sur PlayStation 2 : techniquement à la rue, mais pas suffisamment pour en gâcher l'impact émotionnel. Ici, le hachoir technique a trop bien fait son travail. Un patch disponible dès la sortie du jeu a été publié, modifiant officiellement le rendu, mais rien n'y fait. RiME est incroyablement émouvant et contemplatif sur PC, PlayStation 4 et Xbox One, mais il est incroyablement frustrant et désagréable sur Nintendo Switch. Et ça, c'est au moins aussi triste que la révélation finale du jeu.

Les plus

  • Une direction artistique merveilleuse
  • La bande-son incroyablement immersive
  • Des puzzles créatifs à défaut d'être difficiles
  • De vrais moments marquants

Les moins

  • Un portage aux défauts inacceptables
  • Une petite latence dans les contrôles
  • Une fausse impression de liberté
  • Un prix trop élevé pour un travail bâclé
  • Nintendo-Difference

    par Chozo

    le 19 novembre 2017 23:00

C’est l’histoire d’un jeune homme qui va au cinéma. Amateur de films de zombies, il décide de jeter son dévolu sur 28 jours plus tard. À la sortie de la séance, bluffé par l’atmosphère, la qualité technique et scénaristique du film, il note ce titre sur son carnet des DVD/Blu-ray à acheter dès leur publication. Quelques mois plus tard, dès la sortie de la version sur galette, il court se procurer le film, impatient de revivre l’expérience sur son canapé. Énorme déception. Même si l’atmosphère perdure, la conversion de l’œuvre sur disque souffre d’un traitement douteux, techniquement à des années lumières du rendu sur grand écran, générant un énorme sentiment de frustration et de colère chez notre ami. Ce sentiment, c’est celui que vous aurez seulement quelques minutes après avoir lancé le portage de RiME sur Switch. Le jeu original ayant déjà subi une période de développement accidentée avant son lancement sur PlayStation 4, Xbox One et PC plus tôt dans l’année, RiME sur Switch, c’est comme une traversée laborieuse de la forêt par le petit chaperon rouge. Entre le parcours et ses obstacles, le loup et tous les pervers, la fillette gaspille tellement de temps et d’énergie à rejoindre Mère-Grand, qu’une fois arrivée, ses confitures et galettes délicieuses ont moisi. Oui Tantalus Games et Grey Box, on en est là.


I have a dRiME

RiME nous rappelle avec nostalgie les jeux qui l’ont influencé. À l’image d’ICO ou de Journey, le jeu prend plaisir à éviter d’exposer ses enjeux, qui se dévoilent peu à peu au travers d’énigmes que l’on pourrait retrouver dans une aventure de Link, les combats en moins. Ainsi, RiME présente une expérience enchanteresse jusqu’à son dénouement poignant, dont le travail artistique et l’immersion peuvent largement côtoyer ces titres légendaires. L’histoire commence avec un mystérieux jeune garçon se réveillant sur les rives d’une île inconnue, envoûtante et ensoleillée, couverte de ruines et d’étranges signes visibles un peu partout au milieu d’une faune et d’une flore semblant peu hostiles. Rapidement dans l’aventure, à la suite d’une manipulation de statues engendrant certains phénomènes au son de la voix du garçon, ce dernier se liera d’amitié avec un petit renard, apparemment familier de l’île, puisqu’il apparaît et disparaît régulièrement en indiquant les directions à suivre. Dans un rôle identique, une étrange silhouette noire vêtue d’une cape rouge, que le héros semble poursuivre en vain, apparaîtra de manière ponctuelle. Le cœur de RiME se trouve ainsi dans l’exploration et la résolution de casse-tête. Ceux-ci nécessitent non seulement de la réflexion, mais aussi une dextérité et des réflexes rapides, combinés avec des sessions de plates-formes voyant le héros bondir sur les murs et les piliers de pierre tout en déplaçant certains éléments pour atteindre de nouvelles zones. Simples et rapides à comprendre, les énigmes, même si leur difficulté demeure peu élevée, utilisent très intelligemment l’environnement, les lumières, les ombres, la perspective et même le temps, donnant un petit frisson à chaque résolution, tant l’attachement à l’aventure nous amène à ressentir une évidente empathie pour le personnage.

Les contrôles sont également simples à appréhender. Outre l’interaction avec certains objets, le garçon pourra courir, nager, sauter, s’accroupir et s’accrocher aux parois rocheuses de certaines parties de l’environnement, matérialisées par une petite trace blanche située au bord des éléments. Très lisible et varié, le level-design maintient l’immersion tout en assistant légèrement le joueur, lui évitant de se perdre au beau milieu de l’île. En outre, les passages sous-marins sont également judicieusement fléchés et réalisés, avec une direction du personnage souple et accessible. Mais l’action la plus importante du gameplay reste probablement la voix du héros, utilisée pour déclencher des mécanismes. Le personnage peut de ce fait crier, chanter, rire et murmurer, des variations contextuelles qui dépendent de l’objet le plus proche avec lequel il est possible d’interagir. Malheureusement, ces contrôles souffrent d’une réactivité assez molle dans les déplacements et les sauts, donnant une difficulté involontaire à certaines sessions, nécessitant plus de rapidité que d’habitude.

Autre problème, la gestion des caméras. Non seulement ses angles laissent quelques fois à désirer, refusant de s’adapter aux situations où les murs empêchent d’avoir une lisibilité claire, mais ses ajustements via le stick droit sont aussi particulièrement lents, rallongeant certaines sessions de plates-formes et les rendant parfois ennuyeuses et frustrantes. Ces pertes de temps provoquées à l’insu du joueur nous renvoient à la durée totale de jeu nécessaire pour découvrir toutes les révélations de RiME. Selon la façon dont vous abordez l’expérience, le générique de fin devrait se lancer au bout d’environ 8 heures. L’exploration complète de l’île et la récupération de l’ensemble des objets secrets augmenteront certainement cette durée, tandis que les plus habitués en résolution de casse-tête termineront l’aventure en un peu moins de temps. RiMe offre cependant une certaine possibilité de rejouabilité, puisque les développeurs ont intelligemment rendu les objets collectés permanents. Ce qui signifie que si vous n’arrivez pas à les obtenir tous lors de la première session, vous pourrez rechercher ces objets à l’occasion d’une seconde aventure, tout en ne perdant pas de temps à récupérer ceux déjà connus.

Les contes de GRiME

Plus que par ses mystères, RiME est marquant par l’univers conçu par les développeurs, rendant l’expérience de jeu passionnante. Aux influences largement assumées, l’île, qui est en soit un personnage aussi important que le héros, est couverte de passages, de bâtiments, de faune et de flore mystérieux et est entourée par de magnifiques eaux d’un bleu profond. Régie par un cycle jour / nuit en temps réel, l’île délivre une sensation méditerranéenne qui s’imprègne dans l’ensemble de l’expérience, tandis que la somptueuse bande-son contextuelle vous place parfaitement dans l’atmosphère, accompagnant pas ses crescendos les moments les plus mémorables du jeu. Le joueur vibre avec le garçon, l’encourage et partage ses découvertes, les yeux parfois écarquillés par les mécanismes géniaux débloqués en résolvant les puzzles. Cependant, visuellement et graphiquement parlant, on reste loin d’un The Legend of Zelda : Breath of the Wild, avec qui il partage en un certain sens la direction artistique. L’univers créé demeure bien moins impressionnant que le chef-d’œuvre de Nintendo, dans lequel la liberté d’action et de déplacement est ultime. Si dans RiME, nous pouvons retrouver la possibilité d’atteindre n’importe quel point lointain entraperçu à l’écran, l’inflexibilité des accès à certaines zones s’avère parfois frustrante. Étant largement capable d’escalader certains hauts blocs, le héros peut souvent se voir confronté à des rochers plus petits, à hauteur de genoux et situés un peu hors des sentiers battus, impossibles à traverser. Nous sommes clairement face à un jeu proposant plutôt une illusion de liberté avec des chemins prédéfinis clairs et évidents, au détriment d’une expérience totalement ouverte.

D’un point de vue graphique, certaines concessions ont dû être faites pour ce portage sur Switch. Des textures ont été appauvries, les ombres sont bien moins détaillées que sur les autres consoles, mais la direction artistique est telle que ces régressions n’ont finalement que peu d’importance, surtout au vu des problèmes dont nous parlerons un peu plus loin. Rien dans RiME n’est révolutionnaire, mais l’image demeure en permanence très colorée et stylisée, focalisée sur le thème du voyage et de la découverte à travers des zones ressemblant à des scènes de théâtre en plein air, tout en accompagnant le déroulement très mélancolique de l’histoire. RiME porte encore fièrement ici ses influences, le travail de Fumito Ueda est en particulier dominant ici, même s’il est facile de faire aussi un parallèle avec The Wind Waker. Dans le sillage de Journey, de nombreux jeux rappelant les œuvres d’art et d’essai sont sortis ces dernières années, se distinguant par leur style visuel et leurs récits presque abstraits, mais dans lesquels le gameplay semblait creux et le conte très peu lié au travail artistique. RiME fait ici bien mieux, non seulement en offrant un gameplay plus riche, mais aussi en faisant en sorte que la jouabilité fasse partie inextricable de l’histoire, témoin d’un jeu à l’origine magnifiquement conçu. Conte cinématographique et contemplatif avant tout, mais en même temps très interactif, le jeu bénéficie d’une réalisation soigneusement rythmée et structurée.

Esprits CRiMinels

Il existe trois types de portages, particulièrement identifiables sur Nintendo Switch. Premièrement, nous pouvons reconnaître le portage fidèle qui ne modifie en rien ou presque le jeu original, puisque ce dernier se trouve être facilement adaptable à n’importe quelle plate-forme, ses caractéristiques techniques étant prises en charge immédiatement par la console. On peut ici évoquer les exemples de titres déjà sortis comme LEGO City Undercover, Rayman Legends ou Dragon Ball Xenoverse 2. Nous identifions ensuite le portage d’adaptation, nécessitant ajustements et concessions pour reproduire l’expérience d’origine, avec des restrictions graphiques, des passages de framerate en 30 images par seconde, mais qui réussissent à coller convenablement à la plate-forme moins puissante ou à l’architecture différente des autres supports.

Ici, nous avons les exemples très parlants de Doom, NBA 2K18, Skyrim ou L.A. Noire, certes en retrait technique, mais le travail opéré (parfois via patch) sur ces titres permet de reproduire de manière convaincante les sensations sur consoles concurrentes. Enfin, le troisième type est celui du portage opportuniste, témoin soit d’une part d’incompétence des développeurs, soit d’une méconnaissance de l’architecture de la console cible, soit d’une simple soif de rentabilité rapide liée à l’irrespect total des joueurs Nintendo. Ici, reviennent rapidement les titres NBA Playgrounds ou Unbox Newbies Adventure, qui souffrent d’un portage totalement inadapté à la fonctionnalité hybride de la Switch, aux restrictions graphiques et techniques incompréhensibles et au travail sur le jeu en mode portable honteux. RiME fait bien partie de cette troisième catégorie, mais incarne même son exemple le plus frappant. Ceci est d’autant plus frustrant que RiME est un jeu de base incroyablement attachant, nous emportant dans sa poésie jusqu’à la fin. La force du jeu et de son impact sur le joueur est telle, que même avec le travail honteux du portage sur Switch, certains utilisateurs pourraient passer outre ces problèmes pour connaître le dénouement infiniment marquant de l’aventure. Les autres peuvent, après 15 minutes de jeu, proprement et simplement laisser cette œuvre aux oubliettes, parmi les titres apparaissant en toute fin du défilement sur le menu principal de la Switch.

Malgré cette expérience émouvante, surtout pour ceux ayant déjà retourné le jeu sur un autre support, l’ensemble des problèmes remarqués ici sont proprement rédhibitoires. En mode téléviseur, le jeu demeure indéniablement agréable sur le plan visuel avec un affichage en 720p, mais une fois manette en main, on se rend rapidement compte que le framerate tousse presque en permanence. Le plus grave se produit lors de l’exploration en plan large des lieux les plus riches en détails et en distance d’affichage, ce qui arrive très souvent, en tout cas dans la première moitié du jeu qui se déroule en grande partie en extérieur. L’image freeze à un tel point qu’une impression de disque rayé voit le héros se téléporter sur plusieurs secondes. Bien que RiME soit déjà connu pour ses chutes de framerate sur les autres consoles qui font cependant tourner le jeu à 60 images par secondes, la version Nintendo Switch reste donc rarement stable à 30 images par seconde, décourageant le joueur à réellement explorer l’ensemble de l’île pour récupérer les objets secrets et l’amenant à aller droit vers l’objectif principal. L’expérience devient ainsi injouable par moment, le joueur perd totalement le contrôle du personnage, l’obligeant à anticiper les déplacements fous du héros parfois sur certains lieux nécessitant plus de précision. Par ailleurs, moins grave, un certain aliasing peut se remarquer, avec un léger effet de scintillement étrange autour du garçon. Mais le pire est à venir avec le mode portable. L’équipe de Tantalus avait à l’origine annoncé une expérience similaire en mode portable et en mode téléviseur, avec un affichage à 720p dans les deux cas et 30 images par secondes.

Mensonge ou méconnaissance de l’état du portage, il n’en est absolument rien. Une fois la console en main, une affreuse impression de flou apparaît, comme si une buée s’appliquait sur l’écran. Plus proche du 480p, le jeu ressemble à un titre Wii de la première heure. Plus grave encore, les chutes de framerate et les freezes sont toujours présents, alors que cette concession sur la résolution devrait logiquement améliorer ces problèmes. En réponse aux premiers retours très négatifs des testeurs, les développeurs de Tantalus ont expliqué ce rendu horrible par un choix de portage. Deux possibilités s’offraient à eux. Soit conserver le rendu original en faisant en sorte que l’intégralité de l’île soit chargée en permanence par souci d’immersion, soit découper l’île en zones, engendrant des écrans noirs synonymes de temps de chargement, ce qui aurait certainement évité ces freezes. À notre grand dam, c’est la première option qui a été conservée…

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